Consultation tabac à l’Hôpital : Comment ça se passe ?

Pour arrêter une bonne fois pour toutes, les fumeurs sont de plus en plus nombreux à rechercher un soutien médical.

« Quelqu’un parmi vous a-t-il une grosse envie de fumer ?» Après un court silence, une femme, cinquante ans environ, acquiesce; quatre à cinq personnes font de même. Jérôme Lapont, tabacologue à l’hôpital Broussais (Paris XIVe), propose des substituts, gomme ou pastille. « Qui veut essayer !».

Les regards se croisent, quelques mains se lèvent. Une dizaine de personnes rassemblées dans le Centre de médecine préventive cardiovasculaire acceptent.

Moyenne d’âge : 40-45 ans. Autant de femmes que d’hommes. « Ne mettez pas immédiatement les substituts dans la bouche, je vais d’abord vous expliquer leur intérêt et leur mode d’utilisation. » Le Dr Lapont expose, à l’aide de diapositives, les méfaits du tabac, l’efficacité des traitements de substitution pour stopper la dépendance physique, les difficultés du sevrage, les pièges qui attendent les futurs ex-frimeurs…

On pose ensuite des questions pratiques — « à quelle dose doit-on commencer le patch ? » — on expose ses motivations et ses attentes de la consultation de tabacologie. Comme Marlène, 35 ans, qui songe à avoir un bébé : « J’ai déjà essayé de freiner ma consommation mais sans jamais arrêter.

« Je préfère avoir un soutien ». Ou Arnaud venu « sur le conseil du médecin de travail ».

Des méthodes qui font Leurs preuves

Environ 1 000 nouvelles personnes se rendent chaque semaine dans l’un des quelque 200 centres publics de tabacologie. La plupart d’entre elles viennent de “l’extérieur” ; les autres sont des patients hospitalisés pour des pathologies liées de près ou de loin à leur consommation de tabac. En 2015, tous les hôpitaux de plus : de 500 lits devront disposer d’une telle consultation et ceux de plus de 200 lits, d’une équipe en lien avec d’autres établissements et associations travaillant sur la dépendance.

Ces consultations sont prises en charge à 100 % par la Caisse d’Assurance maladie.

Aujourd’hui reconnues et de fait très sollicitées — il faut compter entre un et trois mois d’attente pour un premier rendez-vous —, elles sont situées dans différents services : en pneumologie, en cardiologie ou encore en psychiatrie.

Tous ces centres s’appuient sur des pratiques validées médicalement. Les méthodes telles l’hypnose ou l’acupuncture sont rarement proposées. Mais rien n’empêche de recourir à de telles méthodes proposées par ailleurs.

Une réunion de groupe “ouvre” la plupart des cures. Elle permet à la fois d’informer et de déculpabiliser les “candidats” d’être ou d’avoir été fumeur. En échangeant leurs sentiments et leurs histoires, ils se sentent moins isolés. Puis, une série de consultations individuelles constituera la cure proprement dite.

Mais certaines unités de tabacologie,  comme celle de l’hôpital Bichat (Paris XVIIIe), offrent le choix de continuer sur le mode collectif : « Il convient surtout aux personnes qui cherchent à créer une osmose avec un groupe, explique le Dr Daniel Garelik. Mais ce choix se fait selon chacun, sachant que les consultations en groupe  nécessitent un délai plus court que les séances individuelles. Et rien n’empêche de passer d’un mode à l’autre. »

Spécialisé dans la lutte contre la dépendance tabagique, le médecin tabacologue possède une double formation en neurophysiologie et en psychiatrie, voire aussi en diététique. Il peut ainsi soutenir son patient sur le plan physique et psychique. C’est avec lui que l’arrêt est décidé dans un laps de temps assez court.

Lors de son inscription, le futur ex-fumeur a reçu un petit guide pratique accompagné d’un questionnaire détaillé visant à établir ses habitudes de fumeur, et d’un test de Fagerström permettant d’évaluer sa dépendance physique. « Cette forme de dépendance est la plus connue et la plus redoutée des personnes venant nous voir, remarque Hélène Pion, tabacologne à l’Hôpital Saint-Antoine (Paris XIIe). Elle passe pourtant très vite grâce aux substituts que nous prescrivons à la quasi-totalité des consultants. »

Un bilan spécialisé est réalisé (tension, pouls, quantité d’oxyde de carbone dans l’air expiré et quantité de cotinine — un dérivé de la nicotine — dans les urines).

Au vu des résultats et au terme d’un entretien minutieux, le médecin établit le traitement. Dans la plupart des cas, il prescrit un substitut nicotinique en adaptant la dose au tabagisme de la personne. Puis le nouvel ex-fumeur est “lâché” dans sa nouvelle vie jusqu’à la prochaine consultation, environ un mois plus tard. Pour éviter de “craquer”, il peut à tout moment téléphoner à la permanence de l’unité.

Tous Les traitements

Les gommes et comprimés sublinguaux qui se prennent à la demande quand l’ex-fumeur en ressent le besoin. La gomme doit être mastiquée durant une vingtaine de minutes; on la conseille surtout aux fumeurs fortement dépendants pour leur permettre de conserver le geste. Le traitement va de six mois à un an. Le comprimé sublingual agit comme la gomme. Il plaît à ceux qui n’aiment pas le chewing-gum. Placé sous la langue chaque fois que l’envie de fumer apparaît, il fond en 30 minutes.

Les timbres ou patchs qui libèrent la nicotine en continu. Les gros fumeurs peuvent en appliquer deux ou trois en début de traitement, puis ils réduisent leur nombre et leur dose (15 mg de nicotine pour les plus forts) au fil des trois mois à six mois de prise.

Un médicament de la famille des antidépresseurs, le Zyban® (bupropion), est prescrit avec parcimonie et en fonction de l’état physique et psychologique du patient. Dépourvu de nicotine, ce traitement peut être combiné avec les substituts nicotiniques.

Mais le traitement médicamenteux n’est que la première étape du sevrage.

« Il procure une réserve de temps comprise entre trois et six mois pour se débarrasser de la dépendance physique et aborder les deux autres dépendances, psychologique et comportementale, explique le Dr Pion. C’est là tout un travail de reconstruction durant lequel l’ex-fumeur doit réapprendre à gérer ses comportements et ses émotions sans la cigarette. »

D’où la nécessité des consultations mensuelles. L’ex-fumeur y trouve une écoute, des conseils (faire du sport, écouter de la musique dans sa voiture, se relaxer) et surtout une relation de confiance avec le tabacologue. Sans compter les nouvelles préoccupations qui peuvent surgir dans les mois suivant l’arrêt du tabac, comme la prise de poids.

Environ deux tiers des ex-fumeurs vont prendre quelques kilos dans les six mois qui suivent l’arrêt. Quelques simples “ajustements” diététiques peuvent aider à limiter cette prise, puis à retrouver sa ligne. Et certaines unités tabacologiques disposent de diététiciennes qui reçoivent une fois par semaine. « L’arrêt du tabac nécessite beaucoup d’énergie et de temps, rappelle le Dr Pion. Nous pouvons voir nos patients pendant deux ou trois ans, voire davantage. D’autres reviennent après une récidive, mais se connaissant mieux, ils sont mieux armés pour arrêter.

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